Dominique Georget-Tessier, novembre 2010 

La fertilité humaine et le développement foetal dépendent d’un bon environnement nutritionnel.

Actuellement un couple sur sept consulte le médecin au moins une fois pour des difficultés à concevoir un enfant et un couple sur cinq a recours à la PMA ou AMP (procréation médicalement assistée) lettres qui sont passées dans le domaine du langage courant comme FIV (fécondation in vitro). Or de nombreuses observations ont fait état d’une baisse sensible de la densité en spermatozoïdes chez l’homme : est- ce l’effet de la pollution environnementale, de la mauvaise qualité de l’alimentation (abondance de calories vides ?)

Le professeur Sultan (Montpellier) [1] a dressé un constat alarmant sur les perturbateurs endocriniens et leurs effets potentiellement néfastes sur la reproduction féminine. Les perturbateurs endocriniens sont très nombreux dans notre environnement : phtalates, , bisphénol A, pesticides, retardateurs de flamme… Un certain nombre de ces produits se comportent comme des xéno-estrogènes et peuvent, à l’instar de polluants comme la nicotine et des dioxines déjà connues, altérer le fonctionnement ovarien, et ce dès la vie fœtale de la future fille !

Il faut savoir que ces perturbateurs endocriniens sont très présents dans le lait (et donc dans les laitages, produits laitiers divers,  fromages)
Le lait que nous consommons en France vient pour 50% de Chine, pour 25% d’Europe de l’Est. Si sa stérilité est assurée, sa composition l’est moins.
IL nous semble important de proposer une consultation de préparation à la conception dès le désir de grossesse et si possible avant l’arrêt de la contraception. 
Il faut savoir que la pilule contraceptive induit une augmentation des besoins en vitamines B1, B2, B9, B12, Vitamine C, vitamine E, magnésium.
Le stress, la pollution (tabac, alcool, pollution atmosphérique, métaux lourds) modifient le climat dans lequel se déroule la grossesse et la périconception du fait de l’implication de facteurs épigénétiques.

IMPORTANCE DE LA CONSULTATION DE PERICONCEPTION  

Elle permet de faire le point par des dosages biologiques sur les statuts nutritionnels du père et de la mère afin d optimiser la santé par l’alimentation. En effet, une part importante de notre capital santé se décide avant la naissance. Nous proposons par cette consultation une médecine préventive individualisée. 

SUR LE PLAN BIOLOGIQUE 

L’épigénétique est une science récente qui étudie l’influence et la transmission des effets de l’environnement sur les individus sans affecter le génome lui-même ( c’est-à-dire le code génétique et l’ADN) mais l’expression de celui-ci. L’expression des gènes est en effet modulée par l’ajout de groupements méthyles sur l’ADN, l’ARN et les histones (protéines « d’emballage « de l’ADN).

L’ajout de groupements méthyles dépend de la présence de folates (vitamine B9) donneurs de méthyle.
L’ajout de groupements méthyles dépend de la présence de folates (vitamine B9) donneurs de méthyle.

En fait, c’est tout au long de la vie que des marques génétiques s’accumulent sur le génome sous l’effet de l’environnement nutritionnel et toxique auquel est exposé chaque individu.

  • Statut en vitamine B9 et B12 : il est le premier à considérer, tant chez le père que chez la mère

Les folates (vitamine B9) sont présents dans les légumes feuillus verts, les épinards, les algues, les noix, les légumineuses. Le statut dépend aussi d’un statut optimal en vitamine B6, B12, B2, et zinc

Cet ajout est important en période préconceptionnelle.

Par ailleurs, on sait depuis longtemps qu’il est important d’avoir un statut en folates de 400 microgrammes par litre, à atteindre au moins 2 mois avant la grossesse et à maintenir pendant toute la grossesse de manière à prévenir les anomalies de fermeture du tube neural (anencéphalie, spina bifida) du fait d’une instabilité du génome. En France, 53 à 47 % des femmes ont des apports inférieurs aux ANC en B9et 5% des femmes ont un statut insuffisant en B12 (ce qui constitue un facteur de risque indépendant d’anomalie de fermeture du tube neural)

  • Statut en vitamine B6 : en France, 50% des femmes en âge de procréer ont des statuts inférieurs aux ANC en vitamineB6
  • Statut en zinc : il est insuffisant chez la femme comme chez l’homme
  • Statut en fer : il doit être objectivé par la biologie (dosage de ferritine ) dès que le désir de grossesse est exprimé.
  • Statut en vitamine D : ilest important de doser le statut en D2 et D3. Le dosage en 25OH D doit être supérieur à 20ng par ml

Il est important de complémenter à 2 périodes : 2 à 3 mois avant la grossesse et pendant la grossesse, en fonction des résultats et de maintenir l’observance pendant la grossesse

  • Statut en magnésium : à optimiser par une alimentation riche en fruits et légumes et en fruits de mer (bigorneaux). Une complémentation est nécessaire
  • Statut en acides gras

Il est essentiel bien avant la grossesse d’optimiser le statut en acides gras en particulier de la série oméga 3 par un apport de 2 cuillérées à soupe d’huile de colza non raffinée par jour (ou de noix) et de poissons gras (maquereaux, sardines, anchois).

  Il est essentiel d’éviter une alimentation en acides gras oméga 6 et en graisses trans susceptible d’avoir une action trans- générationnelle, modifiant l’expression de nos gènes pro-inflammatoires (marques épigénétiques expliquant l’épidémie d’obésité rencontrée chez les nourrissons et également la programmation précoce, périnatale de la plupart des maladies de civilisation telles que le diabète de type 2 et certaines maladies allergiques ): éviter tous les produits industriels (viennoiseries, pâtisseries, quiches, pizzas, biscuits apéritifs, plats préparés, pain de mie, margarines hydrogénées…) On peut rappeler ici que les acides gras trans sont interdits dans l’alimentation au Danemark tandis que chez nous, il n’est même pas obligatoire de le mentionner sur les étiquettes ! (Luc Bodin, chercheur de l’Inserm, Recherche, 28mai 2008)

  • Statut en iode : le statut en iode est souvent déficitaire dans la population. L’OMS recommande100 à 150 microgrammes d’apport d’iode par jour. Actuellement, les apports sont de 50 microgrammes en moyenne par jour. L’iodurie est un indicateur de déficit en iode biodisponible.
  • Statut en calcium : il est à connaître.                    

Il est important d’effectuer un dépistage biologique qui évaluera le capital méthyle (B9, B12) bien avant la conception, la vitamine D, le calcium, le magnésium, le zinc, le DHA, la ferritine et l’iode. Ces examens biologiques sont à programmer et à faire dans des laboratoires spécialisés en micronutrition et à faire également chez le futur père

APPROCHE NUTRITIONNELLE SPECIFIQUE

Au total, on peut conseiller à toute femme en âge de procréer

  • d’éviter puis, dès que la grossesse est programmée, de supprimer alcool, tabac, drogues et si possible médicaments chimiques
  • de supprimer l’alimentation industrielle
  • d’optimiser son statut en acides gras (huile de colza), poissons et éventuellement supplémentation en DHA (fluidité des membranes cellulaires au niveau du système nerveux central et de l’œil en particulier).
  • d’accorder une part importante aux fruits et légumes en particulier les légumes verts à feuilles saupoudrés de levure de bière (sources de B9), les avocats, le soja (source de B6)
  • de consommer des fruits de mer, huîtres, poissons, sardines source de zinc, d’oméga 3, d’iode
  • de consommer 2 produits laitiers par jours (apport en calcium) : yaourt si possible bio, fromage bio ou fabriqué à partir de lait de vache nourrie à l’herbe ou au lin (filière « bleu, blanc, cœur ») ou fromage de chèvre ou de brebis dont la qualité de la provenance est connue.
COMPLEMENTATION

Elle sera bien sûr adaptée en fonction des résultats des examens biologiques et des données de l’anamnèse et de l’examen clinique.

On pourra être amené à prescrire suivant les cas :

  • un détoxifiant hépatique à base de romarin, curcuma, poivre noir.
  • du magnésium

Puis dans un deuxième temps un complément généraliste apportant 400 microgrammes de vitamine B9, des vitamines B et des oméga 3 (DHA) dosé à 250 milligrammes par gélule                   


[1] SULTAN C.  communication faite à l’occasion des dixièmes journées européennes de la société française de gynécologie 14 octobre 2010, Montpellier